C’est une success story à l’américaine qui pourrait un jour, intéresser un réalisateur, et devenir un film.
Mais interdit au moins de 18 ans, classé X. Un récit fou qui se déroule ni à Los Angeles, ni à Miami, mais à Marseille, Salon-De-Provence ou Avignon…
L’histoire d’une bande de jeunes provençaux parti de rien, à l’aide de pas grand-chose, et arrivé dans les hautes sphères du porno. Ils s’appellent Juan, Margaux, Macéo, tous collaborateurs du site internet Jacquie & Michel, société leader dans le domaine de la vidéo amateur en ligne. Un site qui a dépassé les 500 millions de vue, largement popularisé avec son slogan repris dans les stades de foot, et sur de nombreux plateaux télé : « On dit Merci qui, Merci Jacquie & Michel » ! Pas de mise en scène fastueuse digne des superproductions Marc Dorcel, mais des scènes qui mettent aux prises monsieur et madame tout le monde. Avec comme cadre des appartements, des clubs, des parkings ou des terrains vagues de la région.
Aujourd’hui, l’équipe marseillaise est reconnue pour sa gouaille, ses tournages « avé l’accent », et ses interviews crues. Les vidéos dépassent fréquemment le million de clics, faisant des Marseillais les figures incontournables de Jacquie & Michel, qui s’impose comme une des sociétés leaders du milieu du X.
« La clé du succès, c’est que nos vidéos mettent en scène des gens comme vous et moi, qui ont envie de se faire plaisir. Les filles ne sont pas forcément des bombes atomiques que tu ne verras jamais dans la vie » explique Macéo, employé de J&M rencontré au Moulin aux Anges, club libertin huppé de Lambesc, qui accueille fréquemment des tournages. « L’équipe marseillaise est effectivement très productive, on bosse dur. On est amis dans la vie, et on habite dans une ville et une région où les femmes sont plus chaudes qu’ailleurs. Ca peut aider. Je ne vois qu’une seule explication à notre succès : les gens aiment le cul« .
Les romantiques apprécieront. Coiffé comme l’Olympien Florian Thauvin, chemise blanche immaculée, ce jeune homme refuse d’évoquer sa rémunération. « Mes boss m’ont interdit d’en parler« , lâche-t-il en souriant.
A ses côtés, Lola, 28 ans, modèle photo de Salon-de-Provence, déambule en petite tenue. Elle se destine à être actrice et a tourné deux fois pour Jacquie & Michel, dont une fois dans un fameux vignoble. « J’avais envie d’avoir mon petit buzz, et ça a cartonné. Mes vidéos sont devenus cultes, et je songe à en refaire. Le public s’y retrouve, et nous on s’éclate« , glisse-t-elle. Si évidemment, la majorité des vidéos de Jacquie et Michel TV se finissent dans des chambres d’hôtels, chez des particuliers ou des clubs libertins, les scénarios de celles-ci débutent dans les lieux publics. Et Marseille ne déroge pas à cette mise en scène. Ainsi, les Terrasses du Port, Le Vieux-Port, le Fort Saint-Jean, les plages du Prado, ont déjà servi de point de départ à une partie de jambes en l’air. Un fameux troquet du boulevard Chave (5e) a accueilli l’hiver dernier un tournage mettant aux prises Aurélie une jeune serveuse marseillaise à la poitrine généreuse, et son petit ami, un cuistot pervers.
« Ce jour là, le match de foot avait été annulé pour cause de mauvais temps et il n’y avait aucun client dans le bar. L’équipe de J&M, qui sont des amis, m’a demandé si elle pouvait utiliser la cuisine. J’ai accepté immédiatement, même si je ne me doutais pas des retombées« , s’amuse-t-il.
Lors de la mise en ligne de la vidéo, il reçoit de nombreux coup de fil. « Des curieux qui demandaient si Aurélie travaillait toujours chez moi. Ils ne savaient pas que c’était une mise en scène et qu’elle n’avait jamais bossé ici. Je leur ai donc répondu qu’elle avait démissionné, pour ne pas casser le mythe« .
Un mythe qui est aujourd’hui devenu un juteux business dont les retombées se comptent en millions d’euros.
« Des petites stars, malgré nous ! »
Margaux et Juan, respectivement agés de 34 et 36 ans, étaient il y a encore deux ans coiffeuse, et agent de sécurité. Ce couple des Cinq-Avenues (4e) est aujourd’hui responsable des tournages marseillais du site Jacquie & Michel. La plantureuse et tatouée Margaux fait office de reporter-présentatrice, tandis que son compagnon Juan participe, muscles saillants, aux ébats avec les amateurs.
Leurs vidéos dépassent souvent le million de vues, à tel point qu’aujourd’hui, on les reconnait dans la rue… « Les gens nous arrêtent, nous prennent en photos… Ils sont toujours respectueux. Parfois, je trouve des petits mots doux sur ma voiture laissés par des anonymes. Il y a en revanche des fans un peu plus fous qui me demandent de leur envoyer des dessous« , raconte Margaux. « On est ni des footballeurs pros ni des stars de ciné, mais on se rend compte qu’on est devenu des petites stars, malgré nous. A Marseille, Aix, Aubagne, on nous reconnaît. Dans notre quartier, un poissonnier nous a proposé de nous prêter son magasin pour un tournage, des rappeurs nous ont contactés pour figurer dans des clips… La dernière fois, en allant voir ma mère, j’ai vu un couple que je connais depuis que je suis petit. Ils m’ont demandé des t-shirts J&M, et m’ont dit qu’ils s’éclataient devant nos vidéos« , renchérit Juan.
Au moment d’évoquer la place de l’équipe marseillaise au sein de la société du porno amateur, ils indiquent qu’ils ne sont « pas salariés mais pigistes, sous le statut d’autoentrepreneurs« .
« Ca nous prend beaucoup de temps, d’énergie, c’est un travail mais on essaye de se faire aussi plaisir. Nous sommes libertins, l’objectif est aussi de s’amuser. D’ailleurs, il faudrait qu’on mette un jour en ligne quelques making-of, car on rit énormément sur les tournages« , précise Margaux, qui souhaiterait également user de ses talents de chroniqueuses pour des émissions « classiques ». « Je ne veux pas me cantonner à ça, même si c’est plaisant. Pourquoi pas un jour figurer dans Plus Belle La Vie ? » lance-t-elle, en guise de boutade.
Si les tournages constituent une importante part dans leur agenda de ministres, le repérage des lieux potentiels, l’organisation des déplacements et de l’hébergement des participants rythment aussi leur quotidien. « Pour les lieux, des chefs d’entreprises, des particuliers, nous contactent pour qu’on tourne chez eux. C’est un échange de bons procédés, ça leur fait une pub certaine. Il y a même un type qui voulait nous prêter son bateau de 18m, un autre sa maison avec piscine« , clame Juan. « On fait attention aux lieux, jamais nous n’irons tourner dans un jardin d’enfants, ou une cour d’école!« . D’ailleurs le bouillant duo de libertins assure qu’il n’a « jamais eu de soucis avec la justice ». « Les policiers marseillais font d’ailleurs parti de nos meilleurs fans, ils nous arrêtent souvent en criant « Merci Jacquie & Michel »« , précise Margaux.